Sahriel

[Sahriel]

La question de la jeune femme est juste, Sahriel en a donc la réponse.

-Tous les représentants d'une race ne sont pas capables de tuer, et tous ne le doivent pas. Certains nourrissent les autres, d'autres les soignent, d'autres, encore, s'assurent que chacun ne manque de rien. Les vêtements, la nourriture, rien ne s'acquiert sans effort. Mais une race pacifique est vouée à l'extinction, car la convoitise est un pêcher qui sied à tous les êtres vivants, et si personne ne protège le fermier, le tisserand ou le forgeron, alors ces derniers meurent et ceux qu'ils protègent meurent également. Cependant, se défendre ne suffit pas, car une guerre défensive ne se gagne pas, elle épuise et mène inexorablement au même résultat que le pacifisme. C'est pour ça que l'humanité a besoin de guerriers capables de prendre des décisions radicales, afin de protéger la pérennité de l'espèce. Car si nous manquions de tels êtres, les autres races, elles, ne se priveraient pas pour nous l'imposer.

L'Inquisiteur parle d'un ton neutre, assez bas pour ne pas couvrir les sons ambiants, assez fort pour qu'on ne croi pas qu'il complote. Il est fier de ses dogmes et les assume pleinement, le démon, quant à lui, se repaît de cette animosité vengeresse envers des peuples entiers.

-Des banquiers gobelins ? Le chauve crache presque ce dernier mot, une pause, il reprend. J'imagine que si des nains vivent par ici, ils n'en sont pas ravis... Quant à ces fauteurs de trouble, sache que là d'où je viens, les raids de gobelins ne sont pas rares. Ils se déplacent en bandes et saccagent tout ce qui vit, tuent, pillent, brûlent, collectionnent, sans même savoir ce qui sert à quoi. Ils portent nos bols comme chapeaux, pissent dans nos bottes et égorgent nos animaux non pour les manger, mais simplement par plaisir de les laisser pourrir parmi les ruines de leurs saccages. Est-ce une coïncidence si ces créatures, d'une contrée à l'autre, agissent majoritairement de la même sorte ?

Sahriel presse l'avantage, il s'est rendu compte du ton de voix de son interlocutrice, il ne s'attend pas à ce qu'elle approuve de but en blanc, peut-être s'énervera-t-elle, mais au moins elle aura eu son point de vue, et peut-être y réfléchira-t-elle de son côté lorsque leurs chemins se sépareront. Le possédé lance un regard circulaire, la profusion de races différentes lui donne la nausée, mais il n'en montre rien. Il tente de repérer un bâtiment qui aurait de près ou de loin une architecture martiale.

[Brisilg]

Brisilg prend en compte les arguments de Sahriel.

Ma foi, tu n'as pas tort... Pourtant j'ai l'impression que tu fais de cas particuliers un cas général. Il ne faut pas mettre tout le monde dans le même panier. Il y a les civilisés et ceux qui ne le sont pas. Puis que penses-tu des mages qui font du mal aux leurs ? Des meurtriers ? Ceux qui ne protègent pas leur espèce mais qui l'exterminent, également pour le plaisir ?

Elle s'arrête devant des fortifications. Hésitante.

Et... les personnes maudites, tu les tues car elle pourraient être mauvaise? ou tes principes te poussent à trouver une solution ?

Elle le regarde droit dans les yeux, puis regarde la grande porte devant eux.

Derrière cette porte, le premier bâtiment à ta droite est le bureau de la guilde des guerriers.

[Sahriel]

La verve dogmatique semble faire mouche, l'Inquisiteur se réjouit, il tente d'asséner le coup de grâce avant d'arriver devant la porte.

-Reprenant l'exemple des gobelins, je doute que beaucoup aiment avoir affaire à eux, même dans des contextes prétendument civilisés. Les démons, ils sont animés par la destruction, le pouvoir, le contrôle, et tout ce qui peut leur apporter quoi que ce soit de bon. Peut-être existe-t-il dans ce monde une poignée de renégats qui ne partagent pas l'absolue philosophie que l'on prête à ces êtres, mais leur instinct reste présent, et combattre son instinct est un combat souvent perdu d'avance. Une pause, un regard, reprise. Les criminels doivent être punis au même titre que les hérétiques et les monstres. Les lois ont beau être compliquées et valoir à plusieurs niveaux hiérarchiques, il en est qu'il ne faut trahir. Les mages qui jouent de mauvais tours sans raisons, profitent de leur supériorité apportée par la nature pour imposer leur force, les meurtriers qui tuent autrui sans autre raison que le plaisir, ce genre d'individus, ils méritent la justice, et la seule justice pour un assassin est celle de l'épée.

Il pense avoir gagné, il pense avoir convaincu Brisilg, il se trompe. L'évocation des maudits le crispe soudain, un sursaut le trahit peut-être, suivi d'une vive douleur à la poitrine, Osahar a noté l'erreur. Sahriel tente de se reprendre et de soutenir le regard de la jeune femme, la douleur persiste, le démon aussi, il gronde, une erreur, et c'est la fin.

-Les maudits...C'est particulier...Spécial...Je dirais que ça dépend de la malédiction, si elle est curable ou non, si le maudit est maître ou esclave.

La douleur devient insoutenable, la réponse évasive n'a pas satisfait le démon, et ne satisfera probablement pas la jeune femme, mais c'est la seule qu'il ait trouvé si vite avec la sensation lancinante dans sa poîtrine. Il peine à garder une expression neutre.

-Merci Brisilg, j'espère que nos chemins se recroiseront.

Sa voix manque de trembler sur les dernières syllabes, il tend la main pour serrer celle de la jeune guerrière avant de franchir la porte.

[Brisilg]

Curable... souffle la jeune femme à mi-voix.

Elle semble très loin dans ses pensées puis se réveille aussi soudainement lorsqu'il lui tend la main. Elle hocha la tête puis lui fit une bise sur la joue.

Pardonne moi si j'ai trop pris de ton temps. J'espère qu'on se recroisera, oui. Ce genre de discussion me manquait.

Elle esquisse un sourire puis reprend sa route d'un pas rapide, la nuit approchant.

[Sahriel]

La douleur se fait lancinante, Sahriel voit rouge. il remarque un coin sombre, où personne ne regarde, titube un peu, le regard vers le sol, il ne sait pas ce qui l'entoure, il se colle contre un mur, ferme les yeux, tente de calmer sa respiration, de combattre ce démon qui le torture avec allégresse. Un débat intérieur s'engage, l'un prônant la faiblesse, l'autre la discrétion. Après un temps qui lui paraît interminable, le démon se calme en grondant, mais laisse une pointe gêner la respiration de son hôte comme punition. Ce dernier reprend petit à petit ses esprits, le front couvert de sueur et les yeux remplis de larmes qu'il essuie rageusement. Il a lutté, il a gagné, le droit de souffrir un peu plus.

Une fois aussi remis que possible, le possédé se dirige vers ce que la jeune femme lui a recommandé : la Guilde des Guerriers.

[La Conteuse]

[hrp un peu oublié mes excuses.

7 points d'évolution ]